A l’occasion de la Journée Mondiale de la traduction, célébrée par l’Agence des Nations Unies le 30 septembre, la Diair est allée à la rencontre de Saba Kidane. Saba est journaliste, poète, militante politique et traductrice experte chez Réfugiés.info. En valorisant le travail des professionnels de la langue, cette journée vise à revenir sur le rôle central des traducteurs « dans le discours public international et les échanges interpersonnels »[1]

A l’occasion de cet entretien, Saba Kidane est revenue sur le caractère essentiel de la traduction pour faciliter et renforcer les liens entre les individus. Plus qu’un outil de compréhension de la culture de l’autre, la traduction permet aussi aux réfugiés d’accéder aux droits auxquels ils peuvent prétendre dans leur pays d’accueil comme le logement, la santé, la culture….

Selon vous, existe-t-il un lien entre votre activité de traductrice et votre parcours personnel ?

Mon travail de traduction a commencé en Erythrée avec un groupe d’enseignants anglais travaillant pour une ONG – Voluntary Service Overseas – dans lequel mon mari travaillait. J’avais l’habitude de traduire le tigrigna et amharique en anglais pour aider les enseignants dans leur vie quotidienne et je les accompagnais.

Quand je suis partie de l’Erythrée pour me réfugier au Kenya puis en Ouganda, j’ai fait de la traduction pour des réfugiés érythréens et éthiopiens. J’accompagnais des femmes à l’hôpital et traduisais les recommandations des médecins qui étaient en anglais. Cela me faisait très plaisir de les informer et de les accompagner, elles avaient ainsi un accès au soin.

Un jour,  en apercevant le titre d’une affiche en anglais, j’ai pris conscience de la chance que j’avais de comprendre la langue anglaise. Ce titre était : « 3 femmes par jour meurent d’un cancer de l’utérus au Kenya ». Les femmes que je fréquentais n’avaient pas cette chance. Ainsi, la traduction m’est apparue comme un devoir.

Pourquoi vous êtes-vous engagée en tant que traductrice pour Réfugiés.info ?

Une personne qui travaille pour eux dans l’informatique m’a contacté car ils avaient besoin d’une seconde personne pour traduire leurs contenus en tigrigna. Depuis mars 2022, je suis devenue traductrice experte pour Réfugiés.info.

Je traduis mais vérifie également le contenu publié en tigrigna sur le site tout en proposant des améliorations.

Quel sens donnez-vous à la traduction ?

J’aimerais vous donner une réponse poétique (rires). C’est un tunnel d’informations. La traduction, c’est accéder à un monde qui peut sembler lointain. Je suis arrivée en France il y a 10 ans, et je réalise que j’ai manqué beaucoup d’opportunités car je n’avais pas accès à des informations traduites. Même si mon statut de réfugié me donnait accès à des droits, je ne pouvais pas en profiter parce que je ne comprenais pas le français.  Aujourd’hui, je suis fière de pouvoir continuer à contribuer au dialogue et à la compréhension entre des individus de cultures différentes.

[1] https://www.un.org/fr/observances/international-translation-day

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