Le 22 mai dernier, la sixième édition de l’AGORA, rencontre nationale annuelle des acteurs de l’accueil et l’intégration des réfugiés, a réuni plus de 300 participants autour du thème « le travail social au cœur de l’intégration ». Alain Régnier, délégué interministériel à l’accueil et à l’intégration des réfugiés, a souhaité mettre en avant le rôle essentiel des travailleurs sociaux souvent méconnus dans le parcours d’intégration des personnes réfugiées.
Au cours de cette journée, plusieurs intervenants des milieux institutionnels, associatifs, universitaires ont pris la parole. Paolo Artini, représentant du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés en France et à Monaco, a souligné l’importance du travail collectif dans le travail social et la nécessité d’évènement comme celui-ci.
Stéphane Rullac, professeur en innovation sociale dans le champ du travail social, a partagé son expertise sur l’évolution nécessaire du travail social :
« La perspective de l’innovation en travail social : quand les problèmes deviennent les solutions. Si aujourd’hui l’immigration est posée comme problème, elle est la solution de demain et les travailleurs sociaux sont les premières lignes pour tout mettre en œuvre. […] Aujourd’hui, nous sommes dans une société changée ainsi le travail social doit se réinventer. »
Une journée portée par les acteurs du travail social
Tayssir Moaddamani, un jeune réfugié syrien, a illustré l’importance du travail social à travers son témoignage poignant sur l’accompagnement qu’il a reçu de l’association Soliha dès son arrivée en France. Cette prise en charge a été cruciale dans son parcours d’intégration.
Des binômes, représentés par l’association du Groupe SOS et Dahlir, ont partagé leurs expériences, mettant en lumière les obstacles et solutions rencontrés.
Ces témoignages ont été suivis d’une table-ronde réunissant plusieurs acteurs du travail social, animée par la journaliste Caroline Broué, et introduite par Mathieu Klein, président du Haut Conseil du Travail Social, et Emmanuel Jovelin, titulaire de la chaire « Travail social – Intervention sociale » du Conservatoire national des arts et métiers (CNAM).
Karim Boukhachba – adjoint au maire Chargé de la vie associative, du vivre ensemble et des maisons de quartier à la mairie de Creil, Delphine Rouilleault – directrice générale de France Terre d’Asile, Arnaud Richard – directeur général de Coallia, Marion Leroux – directrice de l’INSET d’Angers, CNFPT, et Fatema Rahimi – travailleuse sociale au GIP Habitat et Interventions sociales ont conjointement exploré la question : en quoi le travail social favorise-t-il l’intégration des personnes réfugiées ? Ensemble, ils ont identifié les principaux obstacles rencontrés, et ont proposé des pistes de réflexion sur la nécessité de formation, de communication et de coopération entre les différents acteurs.
Engagement de nos partenaires
AGIR, Anvita, Emmaus Connect, Fondation FACE, FTDA, GIP Inclusion, Les Clubs sportifs engagés, Mano, Réfugiés.info, Reconnect, Les entreprises s’engagent, Uni’R et Kodiko ont tenu des stands sur l’heure du déjeuner et ont pu échanger avec tous les participants sur leurs actualités. L’Initiative Marianne a également été mise à l’honneur au travers d’une exposition « Femmes défenseures des droits ».
Ateliers participatifs autour du travail social
Trois ateliers participatifs ont été organisés, chacun abordant différents aspects du travail social.
« Coordination du travail social et continuité des parcours d’intégration »
Le premier atelier, dirigé par Augustin Rogy, conseiller emploi de la Diair, portait sur la coordination du travail social et la continuité des parcours d’intégration. La coordination des acteurs est un facteur clef pour favoriser la continuité des parcours. Faire coopérer les opérateurs de l’accueil et du droit commun (département, CCAS, service public de l’emploi…) est donc essentiel, de même que fédérer des acteurs partenaires, en particulier les acteurs économiques et du logement.
La prise en compte par le droit commun de la spécificité du public réfugié à travers la désignation de référents ou la sensibilisation des agents est aussi utile, de même que la systématisation du « dites-le-nous une fois » qui permet de fluidifier les parcours.
Enfin, les personnes accompagnées doivent être actrices de leur parcours, d’où l’enjeu « apprendre à apprendre » et d’autonomisation des personnes réfugiées grâce à l’apprentissage de la langue ou des outils comme Réfugiés.info.
« Travail social à l’ère du numérique »
L’équipe de Réfugiés.Info a animé le second atelier mettant en exergue le travail social à l’ère du numérique.
L’atelier comportait trois objectifs : la restitution de leur enquête de terrain réalisée entre 2023 et 2024 auprès de 450 travailleurs sociaux, la réalisation d’une réflexion sur les usages numériques des intervenants sociaux et leurs besoins-clés, la mise en valeur des outils numériques destinés aux professionnels de l’accompagnement social, ainsi que leurs complémentarités. Parmi les problématiques évoquées, plusieurs solutions numériques ont été envisagées :
- Réfugiés.info, qui facilite l’autonomisation des personnes réfugiées grâce à l’accès à l’information
- Reconnect et Mano, qui proposent des solutions numériques pour le suivi des bénéficiaires
- Le Centre d’appui ressources intégration, qui rassemble des ressources numériques pour les professionnels cherchant des formations
- Le programme Triptik, d’Emmaüs Connect, qui forme les bénéficiaires au numérique (autonomie, accès au droit, démarches administratives).
Cet atelier a permis d’identifier des complémentarités entre ces plateformes et d’illustrer leurs applications concrètes.
« Travail social et engagement citoyen »
Le troisième atelier, intitulé « Travail social et engagement citoyen » et animé par Aurore Mayard, conseillère territoires et initiatives de la Diair, a permis de s’interroger sur les liens entre bénévolat et travail social à travers le cas de l’hébergement citoyen.
Les interventions des associations Solidarités Nouvelles pour le Logement (SNL) avec Isolde HOUZIAUX, chargée du développement de la vie associative et Réfugiés bienvenue avec Sami CHEIKH MOUSSA, directeur et Asal AGHAJANBEYGLOO, administratrice et ancienne bénéficiaire, ont mis en lumière les principaux enjeux de cette collaboration, parfois complexe, dans un contexte de crise du secteur social.
Les travaux de cet atelier ont permis de faire émerger la notion que le bon fonctionnement du trinôme bénévoles, travailleurs sociaux et réfugiés, passerait principalement par la définition d’un cadre de l’engagement bénévole, pour faciliter la communication et la compréhension des rôles de chacun, ainsi que par la formation et la valorisation des compétences des bénévoles.
Les lauréats de l’Académie à l’honneur
La journée s’est terminée par la présentation des dix lauréats de la troisième promotion de l’Académie pour la participation des personnes réfugiées, un programme porté par la Délégation interministérielle à l’accueil et à l’intégration des réfugiés (Diair) et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR).
« La participation est une source de motivation, afin d’être mieux accompagné, savoir plus sur les réglementations pour les personnes en exil. […] La participation des personnes concernées permet de s’engager dans le parcours d’intégration et donne aux personnes réfugiées une voix pour qu’elle puisse s’exprimer et partager leur vécu. » Ramin, lauréat de la troisième promotion de l’Académie.
Conclusion
L’AGORA 2024 a été un événement fédérateur qui a permis de réfléchir aux bonnes pratiques et aux améliorations que la délégation et les acteurs du travail social peuvent mettre en place dans l’intégration des réfugiés. Un grand merci à tous les participants pour leur contribution au succès de cette journée.