Quel est votre parcours professionnel ?

Je m’appelle Crispin Kabasa, je suis originaire de la République Démocratique du Congo (RDC) et je réside actuellement en Alsace. J’ai deux masters : un en Sciences Politiques et le second en Ingénierie de projet en Économie Sociale et Solidaire. A la suite de mon premier master, obtenu en 2009 à l’Université de Kinshasa, j’ai occupé plusieurs postes et j’ai notamment exercé en tant qu’assistant du programme de création des écoles solidaires en RDC. A mon arrivée en France en 2015, j’ai demandé l’asile. Dès l’obtention de mon statut de réfugié, j’ai tout de suite commencé à chercher du travail. Suite à plusieurs déceptions, j’ai compris que j’aurais de grandes difficultés à trouver du travail avec mon diplôme et mes expériences professionnelles en RDC, du fait de leur manque de reconnaissance en France. J’ai donc décidé de reprendre des études en France pour valoriser mon parcours et le faire reconnaître. J’ai ainsi été diplômé en 2021 en Ingénierie de projet en ESS de l’Université de Haute Alsace. Pour financer ma période de reprise d’étude en France, j’ai travaillé à l’entreprise Peugeot – Citroën en ligne de montage. Pendant mon master, j’ai participé à plusieurs travaux d’études : un projet financé par le Fonds Social Européen (FSE) de commerce solidaire et un diagnostic territorial à l’échelon intercommunal sur les métiers du service d’aide à la personne. J’ai réalisé mon mémoire sur la précarité alimentaire de longue durée auprès du Secours Populaire du Haut-Rhin. A la suite de ce master, j’ai exercé dans une coopérative dédiée à l’entrepreneuriat culturel et créatif en tant que coordinateur de la coopérative jeunesse de services. Mon travail consistait à recruter et à former les coopérants à la gestion des ressources humaines, à la finance et au marketing. Après cette expérience, j’ai été recruté au sein d’une association de jeunesse comme chargé des missions vie associative et projet ‘‘jeunesse’’. Ma mission consistait à former les jeunes sur la méthodologie de projet et à les aider à répondre à des appels à projets.

 

De quelle manière êtes-vous engagé auprès des personnes exilées en France et quels sont vos champs d’expertise ?

Mon engagement auprès des personnes exilées a commencé dès mon arrivée en France. Je me suis engagé comme bénévole auprès d’une association pour accompagner les personnes en situation de précarité en général et en particulier les demandeurs d’asile, les réfugiés statutaires ainsi que les déboutés du droit d’asile. J’ai commencé par participer aux travaux de manutention et distributions alimentaires. Aujourd’hui je suis le secrétaire d’une antenne de l’association. Au cours de la même année, j’ai adhéré à une autre organisation sur mon territoire qui vient également en aide aux personnes exilées. J’ai participé à des maraudes et aujourd’hui je suis responsable de l’activité de distribution des petits-déjeuners.

En 2019, j’ai créé l’association Alsace Service Solidaire. Nous œuvrons auprès des personnes exilées afin de leur apporter un accompagnement à l’insertion socioprofessionnelle dans le domaine du bien-être (coupe et coiffure, soins, etc.) à destination des publics précaires. Notre association emploie actuellement deux anciens mineurs non-accompagnés (MNA) et parmi nos bénévoles réfugiés, deux ont intégré une formation qualifiante après six mois de pratique au sein de notre salon de coiffure solidaire (Ins’hair). Du fait de ces années d’engagement, j’ai développé un large champ d’expertises qui sont : la gestion de projet, l’animation des équipes, l’accompagnement des publics jeunes, l’entrepreneuriat social (montage de dossier de création d’entreprise de l’économie sociale et solidaire), la recherche de partenariats et de financements dans le secteur de l’économie sociale et solidaire. 

Qu’est-ce que la participation des personnes réfugiées pour vous et comment pourrait-on aller plus loin ?

La participation des personnes réfugiées permet aux décideurs, de donner la parole aux personnes qu’ils ont la lourde charge d’accompagner. Les écouter et les entendre permet de co-construire de bonnes politiques, de bons programmes, et de monter des projets efficaces et adaptés. La participation de manière générale et celle des réfugiés en particulier est l’un des meilleurs moyens de prendre des décisions pertinentes par l’intégration du savoir expérientiel du public bénéficiaire-expert. Pour aller plus loin dans la participation, je pense qu’il faut investir davantage l’échelle locale : il est nécessaire de faire appel aux organisations opérationnelles, de terrain, les plus proches des personnes exilées, celles qui les accompagnent dans leurs démarches d’accueil, d’intégration et d’installation.

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